Fâcheries et engouements

Fâcheries et engouements

lundi 22 octobre 2012

Se souvenir

Ces derniers temps, tout me ramène à l'évocation de choses passées. 
Ne suis-je pas en train de prendre un petit coup de vieux ? 
Sans doute. 
Je n'avais pas ce genre d'inquiétude à 20 ans...
Le temps passe et rares sont les opportunités de se "sous-venir" (littéralement : "venir" par en "dessous", je viens de le remarquer !), de faire affleurer ce qui reste lorsqu'on gratte un peu.
 
Le silence de mise en famille
Pas toujours facile d'évoquer le passé en famille. 
Mon père est parti en ayant tu plein de détails de sa jeunesse, ce qui l'a mené dans la Résistance, pourquoi il a rejeté un côté de sa famille, déguisé son nom (et le mien)... En fait, il ne m'a pas raconté beaucoup. Je n'étais pas assez curieuse.
De l'appréhension à demander. Du coup, je me suis construite sur des bribes, des phrases saisies au vol (les fameux malentendus).
Il est trop tard maintenant.
Avec ma mère, j'ai un peu plus de culot.
Récemment, nous avons passé toutes les deux un week-end dans la ville où elle est née. Je pensais l'interviewer (j'avais un dictaphone dans ma poche), en fait, elle a évoqué pour moi son enfance en arpentant sa ville, comme cela se présentait, je n'ai pas sorti mon appareil. Un retour à ses sources. C'était bien.
Je m'étais pourtant rendue malade, quelques années auparavant, quand j'avais voulu lui parler de certains pans de sa vie de jeune femme, que je devais connaître pour avancer moi-même. Contre toute attente, sa parole a été facile et sans blocage, comme si elle se libérait aussi de se confier à moi... J'avais mis des mois avant d'oser lui parler, si j'avais su...

Garder des traces
Le drôle de film de Noémie Lvosky Camille redouble m'a beaucoup émue lorsque, "repiquant" sa vie d'ado, Camille court chercher le magnétophone pour enregistrer les paroles de ses parents (les magnifiques et pudiques Yolande Moreau et Michel Vuillermoz) ; de même quand tous trois chantent La Petite Cantate de Barbara dans le micro, le jour de l'anniversaire de Camille, ou lorsque cette dernière provoque l'embarras de sa mère, en lui disant qu'elle l'aime fort...
Sans doute que ces inquiétudes, on les acquiert avec les années. Elles n'ont pas encore leur siège dans l'insouciance et l'égoïsme de l'adolescence. n'empêche que...
Nous, qui vivons en accéléré, communiquons par textos, faisons des photos par dizaines, trop vite exposées sur facebook, qui pensons perdre du temps en discussions de voisinage..., ces paroles du passé recueillies, qu'elles soient orales, écrites, ces images retrouvées, photos ou films, nous rattachent à notre histoire, donnent du poids à nos vies.

Mémoire des époques, des objets, des lieux...
J'ai repris "Le Journal de Suzanne", cent pages écrites à la main en 1983 (à 82 ans) par ma grand-mère, de sa magnifique écriture, et photocopiées par ses filles pour chacun d'entre nous. Elle y raconte sa vie bourguignonne, de son enfance au tout début du XXe siècle, jusqu'à ses 45 ans, lorsqu'elle a quitté sa région natale avec ses deux filles pour le Sud. Elle n'a pas eu le temps ou pas voulu écrire la suite, peut-être parce que nous tous l'avons connue dans cette partie de sa vie.
Lorsque j'étais instit (une autre vie !), une de mes collègues aimait travailler avec ses élèves de maternelle sur les objets du passé. Elle apportait par exemple en classe un vieux moulin à café (qui moud encore son café ?), des photos de vieille traction... Les minots prenaient bien la mesure du temps qui avait coulé jusqu'à eux...
Une de mes amies fait de cette démarche son leitmotiv : elle cherche les traces du temps dans tous les lieux qu'elle visite. Elle m'a emmenée par exemple au Centquatre et m'a raconté ce que ce bâtiment magnifiquement restauré abritait autrefois : le service municipal des pompes funèbres de Paris, avec les voitures à chevaux qui déboulaient, les ateliers pour construire les cercueils ou confectionner la livrées des cochers...

Explorer notre histoire, cela donne finalement du poids à nos vies...

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