Fâcheries et engouements

Fâcheries et engouements

mercredi 11 avril 2012

Oh les beaux jours !

Belle performance d'actrice
Un grand moment hier à l'Avant Seine de Colombes, la pièce Oh les beaux jours de Samuel Becket, avec Catherine Frot, poignante et lumineuse dans le rôle de Winnie, comme Madeleine Renaud en 1971.
Elle tient la scène à bout de voix plus d'une heure, enfouie dans une sorte de roche magmatique, au milieu d'un paysage marin, se parlant à elle-même et s'adressant à son compagnon de toujours, le sombre et silencieux Willie.

Un appel à la réflexion
La pièce de Samuel Beckett  nous fait réfléchir à notre condition, au temps qui passe, à notre vieillissement.
Winnie, enfouie dans le magma, isolée loin de tout, seule avec Willie, émaille la monotonie de ses journées d'un discours ininterrompu, dont le spectateur est le confident. 

Le reflet du temps qui passe
On est témoin de ses rituels immuables (la toque, les objets sortis et remisés dans le sac) et on l'écoute parler : les mots qu'elle oublie, ses formulations d'un autre temps (oh le vieux style !) qui la font sourire, les souvenirs qui remontent, sa coquetterie, des réminiscences  érudites (Aristote ne m'aurait pas contredite), sa gaité presque enfantine, et le couple... une relation faite d'habitudes, de silence aussi, que l'on poursuit sans même s'en apercevoir (Willie est situé derrière elle, invisible aux spectateurs aussi).

Samuel Beckett (1906 - 1989)
Une métaphore de la vie, de notre vie ?
Les deux personnages vivent un temps qui se réduit, dans un espace qui se restreint (elle dans la roche jusqu'à la taille au début, jusqu'au cou au deuxième acte, lui sorte de rampant dans des galeries), une mobilité qui s'amenuise. Ils se retrouvent dans une sorte de matrice originelle, le ventre de la terre...
À la sortie du théâtre, les sentiments étaient partagés, certains trouvant la pièce trop pessimisme, d'autres plutôt réaliste... 
Personnellement, j'ai été complètement captivée. La vie n'est-elle pas cette valse-hésitation entre déchéance et résistance, entre gaité et silence ? Et l'univers de Beckett, foutraque et décousu, permet d'aborder avec humour le difficile thème de la fin de la vie et son absurdité. 
Le summum de la représentation théâtrale, n'est-ce pas ?

1 commentaire:

  1. tu as vu la pièce, quelle chance! je vais guetter pour voir si elle passe par ma ville...

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